Généralités
                    « POUGNADORESSE… ce village battu des vents, bâti sur la roche et parmi les roches, ne trouvait à se défendre qu’en se couvrant encore de roches sur les toits »(1).

    Le château de Pougnadoresse, d’une architecture féodale, est situé sur une crête rocheuse, orientée Est-ouest, à 15 km environ au Nord-ouest d’Uzès. Sur la face nord, au bas d’une pente rapide, coule une petite rivière « la Tave », qui prend sa source entre le Bruguères et Fontarèche pour aller se jeter près de Laudun dans la Cèze, affluent du Rhône.

    Ses murs, assis le plus souvent sur des rochers schisteux, sont d’une solidité peu commune ; ils sont bâtis en pierre dure souvent taillées en relief et au marteau ; leur épaisseur atteint parfois deux mètres. De nombreux souterrains auraient existé et plusieurs entrées, murées pour éviter des accidents, sont encore visibles.

    Dans la tour au midi, dite « grosse tour », il existe une grande et profonde glacière. Celle-ci était déjà mentionnée dans une charte du roi Louis le Jeune, qui en 1156, donnait le château avec ses dépendances à l’Église d’ Uzès et à ses évêques. Dans cette charte, le château figure sous la dénomination de Castrum de Pugnaduritia. Ceci laisserait supposer quelque sévère bataille livrée en ce lieu lors de l’occupation romaine. Cependant, l’origine de ce nom reste incertaine.   Une étude assez technique, parue sous le pseudonyme d’ONOMASTICOS, dans un journal régional, l’Éclair de Montpellier, donne une toute autre explication. Nous la retranscrivons in extenso : « Pougnadoresse occupe une crête étroite et déchiquetée, dont le versant nord est abrupt , tandis que le versant sud, en pente douce, exposé au bienfaisant soleil du midi, est abrité par la muraille rocheuse des redoutables vents du nord.

    Pougnadoresse est expliqué par Rostaing (dictionnaire des noms de lieux), par le latin pugnator, combattant, plus ICIA, ce que est une combinaison étrange, dont on ne connaît pas d’exemples semblable. C’est une raison pour l’écarter, si nous avons une explication plus plausible.    Cette explication, c’est la phonétique et le linguistique qui vont nous la donner. La prononciation ne peut être qu’une survivance très ancienne ; les mots romains occitans ne transforment pas en PI une initiale atone POU

    On a donc eu à l’origine un thème PEN ou PIN. Or il existe précisément un mot méditerranéen PENNA , au sens de roche (cf. en espagnol peña : roc, roche). Ce thème – PENNA – roche – répond bien à la géographie physique et l’on sait qu’il a donné des noms de lieux tels que LES PENNES. Quant au second terme, il s’agit du gaulois DURO (avec o bref) qui a signifié « forteresse » d’après Vincent. On a donc eu un mot gaulois – PENNADURO – et c’est sur ce nom gaulois que les latins ont ajouté un suffixe ICIA, ce qui a donné notre – PIGNADOURESSE – « la forteresse du roc ».

    Il existe sur le territoire de la commune de Pougnadoresse un menhir que les gens du pays appellent – la fichade - . Il paraît avoir était planté là par les gaulois pour délimiter leur canton. On peut voir aussi, en plusieurs endroits, des masses de rochers tout à fait importantes, comme celle appelée - rocher troué – au levant du village à 1 km environ.

        Le rocher troué est formé d’une foule de rocs importants, entassés les uns sur les autres avec un art grossier, ceci donnerait à penser qu’il s’agit d’un dolmen. En effet, plusieurs cavités intérieures, correspondant entre elles, pouvaient servir à enfermer les victimes avant le sacrifice. Ce remarquable amas de rochers se termine en pointe formant une grande ouverture de laquelle il tire son nom.

    Les romains ont laissée derrière eux une foison d’objets, fragments de poteries, morceaux de ciments romains, reconnaissable à sa couleur rose, pièces de monnaie et tombeaux. Généralement enfouis dans le sol, ces objets sont le plus souvent mis au jour par les cultivateurs à l’occasion de leurs travaux. Ils sont alors envoyés au musée de la maison carrée à Nîmes. Cependant, une grande pierre tumulaire, portant un inscription latine, trouvée dans la démolition du piédestal d’une ancienne croix, est conservée dans la petite cour du château, où on peut la voir.

    Le château de Pougnadoresse a supporté au cours des siècles de nombreuses épreuves. Tout d’abord, en 1645 au cours du siège mené par noble Gondin - Servezanne, co-seigneur de Saint Quentin contre son beau frère Jean 1er Le Chantre, seigneur du lieu. Les circonstances de cette affaire seront reprises avec des références à la rubrique de Jean 1er , mais nous ne saurions nous priver du plaisir de reproduire ici l’exposé qu’en fait Jules 1er. Nous le reprenons intégralement pour conserver le lyrisme si particulier à son auteur.

    « En 1645, à la suite de quelques démêlés de famille, noble de Gondin – Servezanne, co-seigneur de Saint Quentin, du diocèse d’Uzès, vint à la tête des ses hommes d’armes, assaillir le château de Pougnadoresse appartenant à son beau frère noble Jean Le Chantre premier du nom, seigneur de cette place et de plusieurs autres. Flanqué de hautes tours crénelées, protégé par de larges fossé dits fausses – braies, ayant un fort pont-levis au midi ; défendu au nord par une chaîne continue d’énormes rochers taillés à pic et se balançant sur de profonds précipices, cette demeure féodale présenta soudain à l’ennemi, une barrière infranchissable.

    Force fut donc d’en faire le siège, et la plate-forme, terrasse fortifiée couvrant tout le nord et au midi, les approches du corps d’enceinte, prouve encore aujourd’hui par les nombreuses traces de balles que l’on y aperçoit, que la mitraille a dû pleuvoir et que rien ne fut épargné pour amener la soumission du manoir qui résistait.

    Huit jours déjà s'étaient écoulés et les assaillants étant au même point manifestaient, découragés qu'ils étaient, l'intention de battre en retraite. Il est ici le cas de faire remarquer que l'eau manquait dans la forteresse dépourvue de puits et de citerne même. Le vin, seul boisson en usage, pouvait, il est vrai, convenir aux hommes. Mais il n'était nullement du goût de l'autre sexe, de l'aimable fille surtout du seigneur assiégé, de Mademoiselle Etienne le Chantre (2).

    On voulut aussi de nuit aller chercher de l'eau dehors; le lourd pont-levis du manoir dut dès lors s'abaisser lentement ; le secret fut éventé, l'éveil donné (je ne sais trop comment) et à l'instant même, le château forcé, puis envahi en partie, ne présenta bientôt plus qu'une affreuse mêlée, qu'un combat à outrance, que soutenait en tête de tous, Jean Le Chantre qui, s'embarrassant avant peu dans les éperons qu'il portait, fit une chute et tomba au pouvoir de l'ennemi qui le serrait de près.

    Le châtelain hors de combat, le château ne put tenir plus longtemps. Il capitula donc, et dans son triomphe à bon marché, Gondin sembla traiter de bonne fois avec son beau frère et respecter en lui un brave, qui n'a que le tord d'être malheureux. Mais ce n'était là qu'une infâme trahison ; à une âme aussi vile que basse, il ne pouvait être donné de compatir à l'infortune, de concevoir même un sentiment généreux. Celle du vainqueur de cette trempe tramait aussi sourdement le plus abominable des complot. Ne se défiant d'aucune manière et attiré seul, dans la soirée, dans la première cour du château, Jean Le Chantre ne tarda point, en effet, à tomber raide-mort atteint d'un coup de feu dirigé par Gondin lui même.

    C'était là le signal convenu, c'est alors aussi qu'un horrible massacre vint ensanglanter le manoir sans défense ; instruments aveugles d'un maître sanguinaires, les assaillants pillent, égorgent sans pitié, portent partout la désolation et la mort ; allument la torche incendiaire, mettent enfin le feu aux moulins et cuisines du château, qu'ils réduisent en un tas de décombres et de cendres. Jean Le Chantre qui n'était plus, eut même le corps percé de quatorze ou quinze coups de poignards, la haine et la crainte était telles, que l'on eût dit, qu'ils tremblaient qu'ayant encore un souffle de vie, il se dressât à la vue de leurs crimes et vînt croiser le fer avec eux.

    Parmi les notables tombés sous les coups des traîtres,je citerai entre autres le sieur Arène, viguier de la juridiction du lieu, lequel blessé pendant l'attaque et malade au lit, dans une des capucines, fut froidement assassiné toujours par Gondin qui n'aime qu'à se repaître de sang. Ce n'était cependant point encore assez que d'avoir frappé le père, la vengeance n'était point assouvie, elle réclamait de nouvelles victimes. Sur un cadavre tout palpitant et horriblement mutilé, il lui fallait encore entasser sans vie et frapper d'un fer assassin, deux jeunes créatures, une mère éplorée.

    C'est vous, Pons et Gabriel, timides enfants ! vous aussi, épouse fidèle et mère infortunée ! c'est vous dont le meurtre et le sang répandu par l'inflexible bourreau, doivent faire tressaillir encore l'homme inhumain que l'enfer semble avoir vomi.

    Mais cessez de craindre ! le sang du juste à déjà crié vengeance, le ciel l' a entendu et voilà que des mains amies viennent sauver vous jours menacés, et à travers les souterrains inconnus de l'antique demeure de vos aïeux, guider vos pas vers une retraite assurée.

    Dieu a effectivement, mis à couvert l'innocence et la vertu, et le monstre voyant sa proie lui échapper, pousse des clameurs furibondes et reste stupéfait au milieu des remords qui le ronge, des terreurs qui l'assiègent ; et du fond de sa conscience en désordre, une voix qui le poursuit semble lui crier "tu périras de la peine du talion, la victime sera vengée par ses fils !!."

    Ce drame froidement accompli, on ne sait précisément si Gondin établit momentanément son autorité sur le château de¨Pougnadoresse et ses dépendances. On ne sait trop aussi, si les fils de Jean Le Chantre vécurent cachés et ignorés dans leurs terres ou ailleurs. La tradition dit simplement que Suzanne de Bouet, femme à cœur noble et élevé, n'oubliait point après la prière du soir et du matin, de leur donner un léger soufflet et de leur dire en étalant à leurs yeux la chemise sanglante de son époux "songez un jour que vous avez à venger la mort de votre père !".

    Cette épouse inconsolable, obtint du roi par la suite, un arrêt de mort contre l'assassin de celui qu'elle pleurait mais cette juste expiation qu'elle avait droit d'attendre, le monstre ne la subit pas, il sut se pourvoir en grâce et vécut encore.

    Environ 14 ans après, vers 1659, devenus grands et officiers aux chevaux légers du Dauphin, les fils de Jean Le Chantre se souvenant de la recommandation de leur mère, pleins du reste d'une ardeur toute juvénile qu'excitait en outre le souvenir toujours poignant du meurtre de leur père, eux, braves et décidés, songèrent enfin à punir l'assassin, se prélassant encore dans son crime.

    Aussi prompts que l'éclair, nos jeunes chevaliers partent donc, et sont bientôt à Saint Quentin où demeure noble Gondin - Servezanne, ayant seulement à leur suite un zélé serviteur, le fidèle Bousquety qui, leur confident intime, brûle du même feu qu'eux et dont la mémoire est d'autant plus à bénir que le dévouement aujourd'hui paraît ne plus être de saison.

    En un instant, la stupeur fut générale dans le bourg. Les précautions étaient si bien prises, le plan d'attaque si bien conçu, les maisons de ceux s'étant jadis le plus fait remarquer parmi les ravageurs du château, si bien désignée d'avance, en définitive, la promptitude fut telle qu'en un clin d' oeil, pour ainsi dire, plus d'un lâche avait mordu la poussière. Le plus grand criminel de tous, Gondin, vivait encore. Le ciel le destinait, on eût dit, à voir autours de lui ses employés égorgés, leurs cadavres encore chauds jetés pèle - mêle sur la voie publique ; il fallait qu'avant d'être frappé lui-même, il endurât quelques instants au moins, les terribles angoisses d'un trépas planant déjà sur sa tête comme l'épée de Damoclès.

    Son châtiment ne se fait point attendre. Instruit de ce qui se passe, il arrive fulminant de colère ; en maître, il veut interposer son autorité, mais nos ardents chevaliers, que sa vue rend plus furieux encore, se redressent fièrement et font briller à ses yeux épouvantés, l'arme prête à punir ses lâches forfaits. L'infâme a pâli, il chancelle soudain et une voix tonnante lui dit en l'apostrophant "Jean Le Chantre est vengé par ses fils, criminel tu vas périr" ! ! Cette voix est celles des jeunes gentilshommes et à peine a-t-elle été entendue, qu'un coup part et que Gondin roule avec fracas au milieu du sang des siens, qui ne sont plus.

    L'alerte devenant générale, Pons, Gabriel et Bousquety n'eurent que le temps de sauter lestement à cheval, et habiles cavaliers, ils quittent ce théâtre d'horreur, gagnant à bride abattue les états du Pape, dans le comtat Venaissin. La législation française ne pouvant les y atteindre, ils trouvaient là une retraite assurée. Quelque juste que fût cependant la terrible représailles infligée à Gondin, il advint néanmoins qu'a la requête de la veuve, une condamnation à la peine capitale fut prononcée contre les sieurs de Pougnadoresse et leur serviteur dévoué.

    Le Roi passant plus tard à AVIGNON, et ordre ayant été donné de comparaître à tous les gentilshommes condamnés pour meurtres ou autres méfaits, Pons et Gabriel durent obéir à pareille sommation. Au jour indiqué, ce monarque les admet en sa présence et commence par les interroger. Satisfait bientôt des raisons qu'ils allèguent, content au surplus de leur mine résolue, voulant utiliser du reste les services militairesqu'ils peuvent rendre au pays, il les traite affectueusement et leur fait grâce pleine et entière.

    Peu après cette époque, Pons, l'aîné des deux trouva la mort sur un champ de bataille, Gabriel son cadet continua d e demeurer au service militaire. Il épousa par la suite Jeanne de RIFFARD ; devint chef de famille et la perpétua par ses descendants.

    Malgré que j'ai actuellement rapporté tout ce que nous apprennent et à ce sujet, et la tradition et lespreuves écrites, je crois néanmoins ne pas devoir passer sous silence, la partie romantique (?) de cette histoire, la fable que les habitants du pays et des environs croient comme l'évangile et colportent à que veut l'entendre comme une nouvelle du jour.

La voici :

    Condamnés à mort ainsi qu'il a été dit ci-dessus, Pons et Gabriel auraient eu grâce, il est vrai, mais à condition de monter le cheval Bayard ou Meurtrier : c'était dit - on un énorme quadrupède qui tuait à la minute et sans rémission tous ceux assez téméraires pour l'approcher. Haut comme une girafe, féroce comme un tigre, on n'avait pas encore vu son pareil ; aussi le conservait - on comme une relique dans les écuries de sa Majesté très chrétienne.

    Le monter n'étant pas une petite affaire, les sieurs de Pougnadoresse eurent la ruse de découvrir d'avance du palefrenier, qui en avait soin, les vices et les défauts qu'il avait.

    Au jour désigné et impatiemment attendu, ainsi que l'étaient à ROME les combats de bêtes carnassière devant agréablement dévorer des centaines des condamnés, le Roi (Louis XII), la Reine, les princes, les Seigneurs, toute la cour enfin s'étaient donnée rendez-vous au lieu qu'ils appelaient d'exécution. Les boucheries et tueries légales, ayant (comme on le sait) assez d'attrait en France, à Paris surtout, où le peuple badaud par excellence, se plaît aux grandes émotions de ce genre ; tous, grands comme petits, s'apprêtaient aussi à se repaître de ce spectacle inusité.

    L'horloge a bientôt fait entendre son tintement sombre et cadencé ; l'heure est venue et l'on aperçoit s'avancer dans l'arène, suivi des deux patients, l'énorme et redouté Bucéphale dont la réputation seule fait frémir à cents lieux à la ronde.

    Une sorte de terreur panique glaçait aussi déjà tous les spectateurs, mornes et silencieux ; les âmes philanthropes faisaient des vœux pour ces aimables gentilshommes qui ne faisaient du reste, nullement mentir le proverbe qui dit : "la valeur n'attend pas le nombre des années. Les cœurs chrétiens et charitables les vouaient à tous les saints du paradis, les coquettes à leur tour, tenant furtivement braqués sur eux les lorgnons les plus élégants du monde, disaient tout bas, le cœur tout palpitant, sans doute : quelles tournures agréables ! quels maintiens nobles et fiers ! tout en ces jeunes seigneurs plaît et charme ! mais c'est une horreur que de les exposer ainsi.

    Au milieu de ces impressions diverses, Pons l'aîné des deux à déjà lestement enjambé le cheval si redoutable. Il l'est en effet, on le voit à la minute battre des flancs et entrer en fureur. Ses oreilles se dressent, sa tête se relève avec férocité, sa longue crinière se hérisse, ses larges naseaux s'entrouvrent et de ces profondes cavités on entend s'exhaler comme un infernal sifflement.

    Mais l'adroit cavalier se tient sur ses gardes, il pare avec adresse tous les coups de Jarnac, tient bon, le lasse de mille manières et finit à la longue par tellement le harceler, que fatigué, exténué, même n'en pouvant plus, le coursier tout haletant chancelle enfin, et va lourdement s'abattre pour ne plus se relever.

    Un cri général d'approbation s'élève au même moment de tous les côtés et tout ne fait que l'accroître, quand, à côté de l'animal poussant avec rage le dernier soupir, on voit se redresser fièrement le gentilhomme qui vient de la terrasser. L'entourer de suite, le presser avec transport l'embrasser qui plus est, fut l'affaire d'un clin d’œil et ce délire ne fut encore que plus impétueux, quand le faisant approcher, le Roi lui dit en présence de tous "Jeune homme, tu es digne de vivre pour ta patrie, je te pardonne ainsi que ton frère, tu es un second chevalier sans peur et sans reproche, tu viens aujourd'hui de gagner noblement tes éperons !".

    La chronique va même jusqu'à ajouter que sa Majesté, voulant lui accorder une de ses filles en mariage, dota par conséquence la terre de Pougnadoresse d'une foule de faveurs. L'envie toujours prête à s'alarmer, se mit bientôt à l’œuvre et le fit lâchement empoisonner.

    Telle est l'histoire que j'avais à relater, narration tout à fait fabuleuse, je le redis encore. Mais qui flatteuse pour les habitants du pays (et cela se comprend) est fréquemment racontée par les vieillards assis à la veillée au coin du modeste foyer domestique. Laissons les donc ces bonnes gens, se plaire à s'enorgueillir de tout ce qu'ils croient devoir ajouter à la gloire de leurs anciens châtelains ! C'est là une preuve qu'ils ne sont point encore imbus des idées subversives du siècle. Le jour, en effet, où ils rompront avec tout un passé, celui où le château n'aura plus de prestige à leurs yeux, ils auront cessé d'être patriotes, ils seront révolutionnaire". - 7 février 1853 -

    Le château subit plus tard,les fureurs révolutionnaires. Le 12 août 1790, la municipalité de Pougnadoresse se présenta au Directoire du district d’Uzès et lui apprit qu’un attroupement des habitants du village, ayant à leur tête un étranger, qui leur été inconnu, s’était porté le matin vers 9 heures au ci-devant château du sieur Sorbier (3). Celui-ci avait aussitôt livrés tous ses titres et papiers mais, non contents de les avoir brûlés, les incendiaires demandaient encore au sieur Sorbier une somme de 6000 livres ; qu’il leur avait déjà compté 1200 livres qui étaient tout ce qu’il avait pu se procurer et que les brigands ne devaient quitter le château qu’après avoir reçu le complément de la somme.

    A cet avis, le directoire fit marcher sur Pougnadoresse, 60 hommes de la garde nationale et des troupes de ligne, et y envoya en même temps son président, M. Serre, en qualité de commissaire.

    Le détachement qui était parti à l’entrée de la nuit, fut joint en chemin par le sieur Sorbier. Arrivé au château dans le plus grand silence, il le trouva évacué. Le commissaire ordonna alors, de placer une garde à la porte de chaque maison et fit procéder à leur visite. Ceux qui tentaient de s’échapper étaient arrêtés et conduits au château , où le sieur Sorbier désignait les plus coupables, tandis que le commissaire recherchait surtout le chef de la bande.

    Après bien des perquisitions, il fut enfin découvert et, à la grande surprise, il se trouva être le sieur, Roche fils, premier officier municipal d’Uzès, élu en 1790, reste de l’ancienne municipalité, connu depuis longtemps pour être ce qu’on appelle un « Cébet ». Le juge de paix du canton ayant été appelé, procéda à une instruction. Après avoir entendu quelques témoins, il prononça un mandat d’arrêt contre Roche et trois de ses complices. Ces malheureux on étaient conduits dans la prison d’Uzès par la brigade de gendarmerie de Connaux, et sous l’escorte de notre détachement. Le peuple, instruit de leur arrivée se porta en foule sur l’avenue, et les prévenus ont traversés la ville aux huées et aux imprécations de tout le public qui témoignait la plus grande joie de cette capture. Les avantages de celle-ci furent inappréciables, car le sieur Roche était attendu dans un grand nombre de communes pour y diriger la levée des contributions et le brigandage aurait pu ainsi se propager (4).

    Le tribunal civil condamna Roche à 24 ans de fers de 19 mais 1791. Mais, il fut gracié sous le régime de la terreur. Avec Roche, on arrêta un certain Meyselles ancien fermier des moulins du château.

    En 1793, le château fut à nouveau victime de la tourmente révolutionnaire. Ce serait à cette date que le bâtiment joignant l’aile nord au bâtiments des caves fut brûlé. A cette même époque, l’entrée principale du château comportait un pont-levis fortifié, surmonté de deux tourelles en guérites de rempart, qui permettaient de veiller au loin. Ces tourelles furent abattues par ordre du gouvernement.

    Pour clore le chapitre des généralités sur Pougnadoresse : «Le château de Pougnadoresse, était avant 1790, le siège de la seigneurie de ce nom. Fief noble, ayant droit de châtellenie (droit d’avoir un château fort), ses seigneur avaient la haute, moyenne et basse justice d’où ils se qualifiaient de hauts et puissants seigneurs, Cette terre d’une ancienneté fort reculée avait le titre de marquisat.

    Il paraîtrait que l’écu d’azur au chevron d’or surmonté d’un chef d’argent à trois trèfles de sables et en pointe d’un lyon d’or rampant (5) qui sont les armoiries portées par la famille Le Chantre, auraient primitivement étaient celles du château. Que dès lors elles furent adoptées par eux, certain qu’il est, en tout cas, qu’à l’époque de l’édit du Roi en 1669, ainsi fut fait et prescript l’enregistrement du blason de cette famille.

    Sculptées sur une pierre de taille, ces armes surmontent toujours le dessus du portail du vieux donjon féodal, forcément enlevées lors de la révolution de 93, elles y furent replacées en 1844


    Vers 1850, la commune de Pougnadoresse, y compris le mas de Carrière, comptait 75 à 80 feux et une population d’à peu près 360 habitants.
 

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